Au Café du Commerce, café-calva (2)
Entra un type appelé Genuvalgum (GV) à cause de ses jambes en X. Un grand silence se fit. Croquemort chez Babinsky et fils, le cagneux tuait partout l'atmosphère. « Une bière ? galéja tout de même le père Tacron. L'homme des viandes froides lui sourit :
- Celle-là, on m'l'avait pas encore faite aujourd'hui ! En convaincu du gobelet, il effaça la moitié supérieure de son demi. Et par précaution, il pré-commanda le poison suivant. Un calva bien de chez lui. Spiriterie-sur-Auge, trou normand sentant sa pomme toute l'année.
- Et ce roman, il avance, enchaîna doucereux le patron ?
Les verres sur le champ reposés, la clientèle tendit l’oreille la plus respectueuse. Qui n’avait pas entendu parler, même par accident, des 85 000 mots que Genuvalgum avait produit, nuitamment, dans sa chambre de bonne inspirante ? Ici, on notera que l’écriture serait devenue comme une aventure collective au Café du Commerce. Le petit patrimoine d’un périmètre où la fiction aurait trouvé un heureux refuge.
L’auteur se confia. « L’intrigue est océanique. Il y a un dictateur et une foule de robots, de l’intelligence artificielle, des amours haineuses et une course au trésor à travers un monde en entresol qui jamais ne voit le soleil. Suicidaire, une femme s’entiche d’un informaticien sociopathe qui nargue la puissance impériale des États-Unis sur Internet à coups de virus ! Il y a du polar là-dedans. Jusqu'au dénouement où le lecteur s’apercevra, si tout se passe bien, qu’il n’a rien compris à rien. Comme dans la vie où la fin n’éclaire pas le passé. »
Un murmure flatteur se fit entendre. Un jour de boisson solitaire, le croquemort avait dit-on révélé à Mme Tacron le titre qu’il avait retenu pour qu’elle puisse se représenter l'originalité du projet. « Trépassés simples ». Mmouais, avait elle opiné en regarnissant le verre de l’auteur inconnu.
(A Suivre)
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